Etudes rabelaisiennes
-
TABLE
Diane Desrosiers
Hybridités rabelaisiennes. Présentation
PREMIÈRE PARTIE
Hybridités génériques
Edwin M. Duval
En quoi les oeuvres de Rabelais sont-elles hybrides ?
Eva Kushner
Osmoses rabelaisiennes
Jean-François Vallée
Le dialogue est le propre de l’homme. De l’utopie dialogocentrique rabelaisienne
Claude La Charité
Le roman rabelaisien, la comédie prosaïque et le lourdois
E. Bruce Hayes
La farce hybride dans l’oeuvre rabelaisienne. Les exemples de Thaumaste et de Dindenault
Jelle Koopmans
L’inspiration livresque et l’inspiration théâtrale. Le texte et le livre à l’époque de Rabelais
Marie-Claire Thomine-Bichard
« Un meslange de trop mauvais accord » ? La harangue dans les récits de Rabelais. L’exemple de Gargantua
Renée-Claude Breitenstein
La rhétorique épidictique de Rabelais
Valérie Nicaise-Oudart
Sur quelques textes-monuments du Pantagruel
Pablo Péméja
La poésie dans l’oeuvre de Rabelais
Corinne Noirot
L’étrangeté de l’équivoque rimée dans les fictions de Rabelais
Michael Randall
La Poétique des Grands Rhétoriqueurs dans le Cinquième Livre
Barbara C. Bowen
La poursuite du trivial
Dorothy L. Stegman
Les listes entrelardées ou un genre qui s’engendre
Madeleine Jeay
Les « bons follastres » et autres colporteurs de paroles, cousins de Panurge
Florian Preisig
Matérialité. Le cas des lettres dans les romans de Rabelais
Véronique Duché-Gavet et Trung Tran
Par les images et par le texte. Pour un Rabelais sentimental ?
Nadine Kuperty-Tsur
De l’hybridité générique au sens. Genre, sexe et construction du savoir dans le chapitre 15 de Pantagruel
Samuel Junod
Résurgence et surgissement de la parole dans l’oeuvre de Rabelais
Denis Bjaï
Tous vrays Christians prient dieu, et dieu les prent en grace. Prières et oraisons dans les récits rabelaisiens
Jan Miernowski
Rabelais rituel. Jurons et conjurations
Mawy Bouchard
Il était une fois l’histoire. Rabelais et la satire historiographique
Bernd Renner
La fin du Quart Livre. Apogée du meslange satiricque
François Paré
Le sujet de l’érudition. Lecture des fragments du savoir humaniste dans le Tiers Livre
Philip Ford †
Les interventions didactiques dans le Quart Livre
SECONDE PARTIE
Hybridités intertextuelles et langagières
François Rigolot
Le Griffon, l’hippocentaure et l’esclave bigarré. Hybridité et métalangage dans le Prologue du Tiers Livre
Hybridités intertextuelles
Mireille Huchon
Les mythologies pantagruéliques et la Nef des folz. Hauts sacrements et mystères horrifiques
Andrea Frisch
Ce qu’Alcofribas n’a pas vu. Lucien, Rabelais et la question du genre
Arnaud Laimé
L’avant-garde néo-latine, précurseur de Rabelais. La Barbaromachie de Nicolas Petit
Pascale Mounier
Recette des macaronis et art du roman. L’influence du Baldus de Folengo sur la polyphonie rabelaisienne
Roy Rosenstein
De La Célestine (1499) à Pantagruel (1532). Histoire de deux planctus
Marie-Dominique Legrand
Les adages d’Erasme dans le chapitre XXI du Cinquiesme Livre de Rabelais. Petite pérégrination pleine d’explorations intra et extra textuelles
Philippe Baillargeon
Les « permutations » de la folie dans le Tiers Livre
James Helgeson
Rabelais, le Pantagruélion et le « je » hybride. L’exemple du Tiers Livre
Caroline Lebrec
L’art de feindre dans le « Prologue de l’autheur » du Quart Livre
John McClelland
Pantagruel et Gargantua. Essais d’autofiction
John Parkin
Quaresmeprenant revu
Florence Dobby-Poirson
Entre les mirabilia et l’étude anatomique. Quaresmeprenant
Grégoire Holtz
« Africque aporte tousjours quelque chose de noveau ». Rabelais, l’Orient et la Vie d’Apollonius de Tyane
Ruxandra Vulcan
La curiosité naturaliste. Rabelais, Pierre Viret
Walter Stephens
Les aventures curieuses des livres. L’imaginaire bibliographique après et avant Saint-Victor
Normand Doiron
Rêver Rabelais
Dominique Bertrand
Récit hybride et signature cynique. De Rabelais à Dassoucy
François Rouget
Un exemple de la réception de Rabelais au XIXe siècle. L’affaire Vrain Lucas
Hybridités langagières
Paul J. Smith
Les langues de Panurge. Une relecture
Marie-Madeleine Fragonard
Cheli, ou regards sur les choix individuels
Isabelle Garnier
« La vraye et vive foy catholicque ». Hybridité lexicale et conciliation doctrinale dans le Tiers Livre
Ariane Bayle
Nasier / Homenaz. Un cas de contamination rhétorique
Frank Dobbins †
Les récits musicaux de Rabelais
Claude-Gilbert Dubois
Mimologie ou le monde du silence rabelaisien
Index nominum
Attachée aux idées d’impureté, de dégénérescence et de stérilité dans l’épistémè renaissante, mais valorisée par les régimes esthétiques moderne et postmoderne, l’hybridité est à la fois un propos et une manière de la geste pantagruélique. Ce volume considère trois registres où Rabelais tantôt dissimule les sutures de son bouturage poétique, tantôt en exhibe les tensions productives. Dans l’ordre générique, les fables, listes, joutes oratoires, prières et autres formes littéraires tissent des liens atypiques, mais vivaces. Fécondes aussi sont les rencontres de nature intertextuelle, qui puisent aux sources les plus diverses (savantes et populaires, antiques et contemporaines, françaises, européennes et orientales) et s’observent jusque dans les contrefaçons rabelaisiennes du XIXe siècle. L’hybridité langagière, enfin, procède du mélange babélesque des langues et du croisement d’autres systèmes de signes, ceux-là harmonieux ou inaudibles, comme la musique et le gestuel, voire le silence même.
-
-
-
-
-
-
À travers un jeu narratif complexe, sans cesse renouvelé, le texte rabelaisien manifeste avec constance le rejet d’une temporalité linéaire et vraisemblable comme structure du récit. Sur le mode burlesque de la fiction pseudo-historique qui joue sur la confusion des genres, il présente une dénonciation en règle des défauts de l’historiographie médiévale et contemporaine. Le récit n’en esquisse pas moins une poétique de l’histoire, s’appropriant à la fois le trésor exemplaire des histoires antiques et les traditions de la mémoire des peuples, capable aussi de transmettre à la postérité le mémorable tragique de son époque. Ce faisant, la méditation rabelaisienne s’élargit à un questionnement existentiel sur le temps, principe même de la création et de la maturation de toutes choses, tandis que l’expérience humaine de sa vertigineuse infinité est celle d’une béance, que rien ne vient combler, sinon le détachement de l’individu à l’égard de sa propre finitude.
-
-
Platon, que la Renaissance ne manque jamais de qualifier de « divin », est l’auteur le plus souvent cité par Rabelais. Découvert, dans les années 1520, au couvent de Fontenay-le-Comte par un jeune François tout aussi helléniste que franciscain, le philosophe grec n’a jamais cessé de prodiguer sa vénérable « authorité » — le plus souvent en son nom — tout au long de la carrière d’écriture du recréateur de Pantagruel. Comment Rabelais a-t-il lu Platon ? Il faut, pour répondre à cette question, ne pas réduire la figure de l’Antiquité aux seuls « beaulx dialogues », mais prendre en considération cette symphonie platonicienne qu’à la suite de Marsile Ficin, les Humanistes pouvaient entendre. Grâce à une telle entente, toute syncrétique, Rabelais fait résonner dans son œuvre une autorité (néo)platonicienne qu’il ne s’agit plus de percevoir comme une simple « source », mais comme un foisonnant intertexte dont la relecture, directe ou indirecte, est une perpétuelle récriture, qui ne cesse de varier entre 1532 et 1552.
-